Surveillance des cultures Le réseau remis à plat
Les « Avertissements agricoles » vont être remplacés par un « Bulletin de santé du végétal » régional, sans préconisation de produits phytosanitaires. Il reste à organiser le jeu collectif entre les différents acteurs.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
Au 31 décembre 2008, les « Avertissements agricoles » issus de la Protection des végétaux n'existeront plus. Un nouveau réseau de surveillance, prévu par le plan Ecophyto 2018 (axe 5), devra se mettre en place d'ici à la campagne 2009-2010.
Le but : mutualiser au niveau régional et pour chaque filière les réseaux d'observation existants afin d'éditer un « Bulletin de santé du végétal » censé être plus complet.
2009, année de transition, va permettre aux régions de s'adapter à la nouvelle trame (voir l'infographie), qui sera précisée dans une circulaire du ministère de l'Agriculture envoyée prochainement aux directeurs de Draf (direction régionale de l'agriculture et de la forêt).
« Un gros travail en perspective car il faut réinventer un outil dont les agriculteurs ont vraiment besoin », indique Adrien Boulet, de l'APCA (Assemblée permanente des chambres d'agriculture).
Certaines régions, comme le Rhône-Alpes, la Champagne-Ardenne ou la Normandie (lire l'encadré), ont déjà anticipé, en organisant leur propre réseau d'observateurs sur leur territoire. « Mais un exemple de mutualisation des observations mené depuis deux ans n'a pourtant pas porté ses fruits. Il y avait d'énormes différences de contributions. Il faudra donc s'assurer que tout le monde participe à hauteur de ses moyens », prévient Bernard Pons, d'Opticoop.
Dans d'autres zones, le Service de la protection des végétaux (PV) va continuer à recueillir les données, tout en organisant le transfert des savoir-faire pour se préparer au nouveau dispositif.
Dans le Nord-Pas-de-Calais, « la Protection des végétaux va rester très impliquée en 2009 dans l'observation du territoire, tout en formant des professionnels issus de la chambre d'agriculture,de la Fredon (1) ou d'instituts tels qu'Arvalis, le Cetiom ou l'ITB, explique Serge Duvauchelle, chefdu service de la PV régionale. Nous continuerons également à réaliser l'analyse de risque et à préciser les seuils d'intervention, mais sans donner de préconisations phytosanitaires. Ces données seront disponibles sur le serveur de la Draf. »
Des protocoles à définir
Pour la prochaine campagne, un comité national d'orientation, présidé par la DGAL (Direction générale de l'alimentation), chapeautera le réseau et pourra s'appuyer sur le comité de surveillance biologique du territoire. Un comité déterminé au niveau régional et présidé par la chambre régionale d'agriculture devra identifier un animateur qui pilotera les réseaux d'observation.
Une base de données régionale puis nationale sera alors alimentée. Mais les protocoles d'observation et de récupération de données restent encore à définir. Un groupe de travail, composé de l'APCA, l'Acta et la FNLON (2), vient justement d'être lancé pour six mois afin d'établir un état des lieux des protocoles, des bases de données et des modèles existants sur le territoire.
D'ores et déjà, des instituts tels qu'Arvalis et le Cetiom estiment posséder des atouts à fairevaloir. Ils proposent leur outil « Vigicultures » qui permet de saisir les observations.
Après l'alimentation de la base de données, des bulletins seront alors rédigés. Grâce à une analyse de risques, ils pourront aller jusqu'au seuil d'intervention mais pas jusqu'à la préconisation de produits phytosanitaires. Des messages réglementaires ou des notes nationales pourront accompagner le cas échéant ce « nouvel avertissement ».
L'Etat ne fera donc plus de préconisation mais conservera son rôle de biovigilance et de contrôle. Il veillera au bon fonctionnement de la collecte des données du nouveau réseau.
Nombreuses craintes
Le bulletin, dont le directeur de la publication sera le président de la chambre régionale d'agriculture, devrait être accessible par internet, courriel ou fax. Sera-t-il gratuit ou payant ? Le ministère doit encore trancher. Le montant et la répartition du financement de ce nouveau dispositif restent également à définir à travers la loi de finances pour 2009, votée à la fin de décembre 2008.
Si le bulletin est accessible pour les agriculteurs, il le sera aussi pour les prescripteurs (coopératives, négoces, chambres d'agriculture, conseillers privés), qui pourront le reprendre et ajouter leurs préconisations phytos, à condition d'avoir l'agrément.
« Tous les dispositifs de conseil devront obligatoirement être issus de la mise en commun des données d'observations », précise l'APCA.
Outre le financement de ce programme, d'autres craintes voient le jour. Pour préconiser des produits, le prescripteur doit être agréé. Avec le nouveau dispositif, cet agrément pourrait-il être annulé si le prescripteur n'a pas participé au réseau ou à son financement ?
Concernant l'objectivité, pour que l'agriculteur conserve son pouvoir de décision, il faudrait être certain d'avoir accès à la fois au bulletin issu du réseau régional et à celui des prescripteurs. En cas de litige, la question se pose aussi sur la responsabilité du président de la chambre régionale d'agriculture, directeur de la publication du bulletin.
Enfin, l'obligation pour l'agriculteur de consulter ce bulletin pour être éligible aux aides Pac, voire pour obtenir une certification, est aussi évoquée.
_____
(1) Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles.
(2) Fédération nationale de lutte contre les organismes nuisibles.
La Haute-Normandie est une région pilote
|
Interface. Les données concernant le colza sont disponibles grâce à l'outil d'observation des cultures « Pernel ».
La Haute-Normandie a pris de l'avance dans la mutualisation des données, et pour cause : l'arrêt des avertissements agricoles est effectif depuis près d'un an. Une réflexion a donc été menée il y a longtemps.
La Protection des végétaux a contacté différents acteurs pour mettre en place un réseau d'observations sur grandes cultures. Ainsi, les instituts techniques, la Fredon, les chambres d'agriculture et certains distributeurs participent actuellement à ce dispositif.
Ils partagent ces informations dans un pot commun. Les résultats sont accessibles, sans interprétation, sur le site internet de la chambre d'agriculture de l'Eure pour le colza seulement, car il y a eu un financement du département.
Pour les autres cultures, seuls les organismes participant à ce réseau peuvent y avoir accès. « Ce dispositif implique des moyens. Si nous participons au système, c'est à condition qu'il soit alimenté par tout le monde. De plus, il reste encore à harmoniser les outils de saisie, mais aussi les protocoles de suivi d'observations », indique Michaël Tavernier, de la coopérative Cap Seine.
[summary id = "10022"]
Pour accéder à l'ensembles nos offres :